mardi 26 août 2008

Virée dans le Nord-Liban : Tripoli et la région du Akkar













Départ de Beyrouth dans la matinée. Le ciel toujours bleu d'habitude est absent pour une fois. Le gardien de notre résidence, un chrétien orthodoxe nous a mis en garde quand il a appris que nous partions pour le Nord du Liban ce jour là. Il fait parti de ces libanais, qui voyagent peu dans leur propre pays, par frilosité face à des risques réels ou imaginaires, dans la plupart des cas. A croire que seuls les étrangers sont assez "inconscients" pour s’aventurer en certains endroits du territoire libanais (ma courte séquestration par le Hezbollah avec mon père l'an passé dans un quartier de Beyrouth nous a pourtant servi de leçon...). Il est vrai que l’an passé, l’armée libanaise a perdu beaucoup d’hommes et mis des mois à venir à bout des quelques extrémistes fanatiques qui voulaient instituer un califat dans le nord du liban, à partit du camp de réfugiés palestinien de Nahr el Bahred se trouvant à la sortie nord de la ville de Tripoli. Il était alors extrèmement risqué de passer par là, car des snipers isolés présents dans le camp, visaient parfois des voitures civiles qui circulaient à ses abords....Il est aussi vrai qu’au moment de mon arrivée un mois plus tôt, des affrontements entre communautés chiites et sunnites avaient aussi fait des morts dans la région de Tripoli, mais ça c’était calmé depuis ; et chose plus malheureuse encore, un attentat au colis piégé dans un bus collectif venait de faire des morts et des blessés une dizaine de jours plus tôt en plein Tripoli.
Fait exceptionnel, pour la première fois, des gouttes de pluie viennent s’écraser sur le pare-brise de notre voiture au passage de la baie de Jounieh, le ciel est gris. C’est la première fois de ma vie que je vois de la pluie l'été au Liban, au bout de plusieurs voyages en cette saison! Certes il n’y en a pas beaucoup. On passe Byblos, et les quelques barrages militaires habituels. Traversons le tunnel débouchant sur Chekka qui marque vraiment le début du « Nord » Liban. C’est ce tunnel que les fanatiques de Nahr el Bahred avaient prévu de faire exploser l’année passée de façon a isoler le nord du reste du pays et d'instituer leur fameux califat ; explosion qui devait être accompagnée en parallèle du dynamitage de l’hôtel Phénicia à Beyrouth, dans le but de destabiliser le gouvernement déjà fragile à l'époque, et de créer un second choc psychologique fort au sein de la population. Nous approchons de Tripoli, des voitures sont arrêtées en vrac le long de la bande d’arrêt d’urgence, des gens sont descendus et se penchent au –dessus d’un pont. La curiosité est trop forte, nous nous arrêtons à notre tour ; plus bas un malheureux sans doute un imprudent a finit dans le ravin à une dizaine de mètres en dessous du pont. La carcasse est dans un sale état, difficile d’estimer la trajectoire qui l'a conduit là. Des militaires sont présents, un drap semble flotter à l’intérieur de l’habitacle, le ou les passagers sont encore présents à l’intérieur ? je ne sais pas de là où je suis. Malgré le tragique de la situation, les gens paraissent souvent détachés, certains rigolent en regardant l'épave, les nerfs sans doute. Moi même, je ne suis pas plus touché que cela, j’en vois tellement qui font les fous sur la route que je me dis « merde le pauvre ; mais bon, il a du vouloir faire le con et frimer sur la route au volant de sa grosse mercédès...alors....c’est son problème maintenant s’il se trouve là». Dernier contrôle militaire, et nous entrons dans Tripoli, tout paraitrait calme, si la présence de maillages militaires filtrant habituels sur tout le territoire, n’était plus resserrée que de coutume. La seconde ville du Liban offre en arrivant une allure de ville moderne, des grandes avenues sans charme qui se coupent à angles droits ; et une autre partie plus ancienne située près de la forteresse Saint-Gilles, siège de l’ancien Comté de Tripoli, avec ses souks, ses marchands de quatre-saisons et ses anciennes mosquées. En chemin, on s’arrête au « Palais », l'une des meilleures patisseries du Liban, acheter quelques douceurs ; à l’intérieur c’est plein, et ça sent le propre et les produits frais. Mais le but de notre journée n'est pas la visite d'une patisserie si accueillante soit-elle...mais celle du Akkar, une région assez sauvage, relativement peu visitée, limitrophe de la Syrie, alors on ne s’attarde pas trop dans les rues de Tripoli. Décidément, ce sale temps persiste, la route grimpe, les villages ne sont pas toujours bien indiqués et les panneaux ne sont pas toujours écrits en alphabet latin, ce qui complique encore la tâche. Renseignement pris, nous venons de traverser dans un épais brouillard le village de Akkar sans même avoir pu voir les vestiges de sa citadelle croisés ! Et encore moins le magnifique panorama donnant sur la trouée d’Homs et le Krak des Chevaliers à quelques dizaines de km de là, en territoire syrien bien évidemment ! La route pleine d’ornières (pire que lors de notre virée dans le Sud Liban !) et de plus en plus étroite, se transforme petit à petit en chemin de terre! A bord de notre Nissan Micra, on ne fait pas les fiers ! et on regrette de ne pas être à bord d’un confortable 4x4 ! Heureusement, les habitants des petits villages reculés, quand ils parlent le français ou l’anglais, nous sont d’une aide précieuse ! Le chemin de terre continue encore sur 2 ou 3km et nous retrouvons la route « principale » goudronnée ! Il était temps. On arrive sur un plateau rocheux, et on redescent vers Tripoli dans la grisaille, nous venons de décrire une boucle dans la montagne de quelques dizaines de km. Sur le chemin du retour, avant d’entrer sur Tripoli, je reconnais sur ma droite le camp de Nahr el Bahred à ses maisons détruites à quelques centaines de mètre de la route. La journée ne saurait être complète sans une dernière baignade aux alentours de Byblos, avant de regagner Beyrouth à la tombée de la nuit.

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